Press release

10/2022

Plus de 200 gérants d’agences de paris en justice contre l’État

Depuis le 1 er octobre, les agences de paris du pays doivent demander une pièce d’identité aux joueurs. Il s’agit de vérifier que ces personnes ne figurent pas sur la liste Epis des interdits de jeu. Mais les agences doivent aussi prendre une photo de ces joueurs, qui, de leur côté, doivent signer un registre lors de chaque passage. Même si c’est plusieurs fois par jour. Tout ça est conservé dix ans.

Protection des données

Cette mesure, qui fait l’objet d’une loi de juillet dernier et d’un arrêté royal d’application, a été prise au nom de la protection des joueurs. Mais, ainsi que l’affirme depuis des mois le président de l’Union professionnelle des agences de paris (UPAP) et patron de Ladbrokes Belgium, Yannik Bellefroid, cette loi viole le RGPD (Règlement général de protection des données). L’UPAP introduit donc ce mardi matin un recours contre l’État.

Mais pas qu’elle. L’union professionnelle est suivie par 202 commissionnaires qui affirment que, depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, c’est une catastrophe en termes de fréquentation. « Les premiers retours du terrain mettent en lumière une perte de chiffre d’affaires de quelque 25 % dans le chef des indépendants qui gèrent les agences de paris », indique M. Bellefroid.

Le système concerne tout le pays mais c’est devant le tribunal de première instance de Namur que le recours sera déposé, comme le confirment les avocates Audrey Lackner et Audrey Despontin. « Ça concerne aussi bien la Wallonie que Bruxelles et la Flandre », nous dit Audrey Lackner. « La violation du RGPD n’a pas été prise en compte ni par le ministre, ni par les parlementaires qui ont voté cette loi. » Ce que les avocates et leurs clients reprochent à l’État ? « C’est la disproportion entre les moyens employés et le but à atteindre », nous explique M me Lackner. « Le fait de prendre une photo, la conservation des données durant 10 ans, par exemple, face au but recherché qui est celui de la protection des joueurs. Le principe de proportionnalité veut que les moyens demandés soient nécessaires pour le but à atteindre. Ce n’est clairement pas le cas ici. De plus, il suffit de franchir la porte d’une agence, même si on ne joue pas, ou même si on parie deux euros, pour être ainsi fiché durant dix ans. »

Discrimination

De plus, comme nous l’avons déjà souligné, les agences de paris soulèvent une discrimination par rapport aux librairies et à la Loterie nationale. Pour jouer dans une librairie, il n’est pas nécessaire de recourir à la liste Epis : « Si le but poursuivi par le législateur est de prévenir les addictions, alors il faut le faire pour tout le monde », dit Audrey Lackner.

Ajoutons que l’inscription obligatoire, la consultation de la liste Epis, la prise de photo et la conservation des données existaient déjà pour les casinos et salles de jeux.